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Titre du blog : Compagnie LES BALADINS
Auteur : moliere
Date de création : 07-07-2008
 
posté le 02-08-2008 à 16:35:45

Compagnie RENAUD-BARRAULT - ODEON-THEATRE DE FRANCE - 1962 A 1965

 Mes chers amis bonjour, après une période de "vaches maigres" - tournées en banlieue, petits rôles ci ou là, j'eus l'immense bonheur d'entrer dans la Cie RENAUD-BARRAULT. La Compagnie, après une période d'errance au Sarah-Bernhardt, au Palais-Royal et autres se voit confier l'Odéon, resté un peu en retrait depuis que la Comédie Française l'avait déserté. DE GAULLE vient d'arriver au pouvoir et par là même créer un poste ministériel de la culture qu'il confie à André MALRAUX. La culture prend tout à coup une importance nouvelle (bien atténuée depuis malgré le coup de boutoir que lui a donné Jack

LANG).

En plein quartier latin, Jean-Louis BARRAULT a la véritable ambition de redonner à l'Odéon une nouvelle jeunesse et d'en faire aussi un grand centre de création artistique. 

C'est dans ce contexte-la que je signais mon premier contrat dans la compagnie où je devais rester 3 saisons. Vous décrire l'état psychologique dans lequel j'étais transplanté tout à coup de petites et moyennes scènes à cet immense plateau de l'Odéon serait entreprise quasi mpossible.

Un monde s'ouvrait à moi, jeune comédien, qui autour de Madeleine RENAUD et Jean-Louis BARRAULT, voyait défiler de nombreux artistes en renom et de grand talent. Durant les 3 saisons que j'ai passé dans la compagnie, j'ai participé à une multitude de pièces, j'ai joué quelques rôles intéressants, mais surtout j'ai regardé, j'ai admiré tous les acteurs que je côtoyais. Il y avait bien sûr le noyau de base qui composait depuis longtemps la compagnie tels que Jean DESAILLY et Simone VALERE, Pierre BERTIN, J.P.GRANVAL, le fils de Madeleine RENAUD et quelques autres.Et puis, il y avait des comédiens merveilleux qui débutaient ou en étaient au début de leur carrière théâtrale tels que Sami FREY, Geneviève PAGE, Roger BLIN, ami de longue date de Barrault, Daniel IVERNEL et surtout des comédiens tels que Dominique PATUREL avec qui j'ai pu tisser un temps des liens d'amitié, J.P.BERNARD, et je ne vous cite que les plus connus car il y en avait tant d'autres qui étaient formidables. Tout ce monde créait une atmosphère bourdonnante de débats et bruissante d'amour du théâtre.

J'en viens à présent aux pièces représentées tout au long de ces années, tout au moins les principales:

LE SOULIER DE SATIN, superbe pièce de Paul CLAUDEL et que J.L.BARRAULT avait créé 20ans plus tôt en pleine occupation à la Comédie Française. La pièce est magnifique, un texte d'une pureté sans faille, des personnages romantiques et modernes en même temps, mais très longue déjà à l'époque-4 heures-, elle s'est encore allongée par la suite. Elle était jouée divinement par Geneviève PAGE qui donnait au personnage de Doña Prouhèze une pureté s'apparentant au diamant, Sami FREY qui avec sa voie un peu rocailleuse se débattait dans le personnage de Don Rodrigue avec une subtilité et une violence intérieure très personnelle, Jean Pierre BERNARD qui campait un Don Camille majestueux et impérial et Jean DESAILLY qui jouit l'ange qui tire les fils auquels est attachée Prouhèze. Il faudrait bien sûr citer P.BERTIN et tant d'autres mais nous n'en finirions plus. Vous résumer la pièce serait impossible.

Elle foisonne de tellement d'intrigues, d'allégories, de personnages ancrés sur terre et de personnages célestes, tels que les décrit P.CLAUDEL.

Quand on jouait la pièce matinée et soirée, c'était pratiquement du non-stop, mais quant à moi, je n'en perdais pas une miette. J'étais partout dans les coulisses, sur scène, dans le foyer des artistes et bien sûr j'arrivais très en avance dans les loges pour me préparer et sentir le théâtre. Voici ci-joint une photo d'une répétition représentant la descente de la vierge, J.L.BARRAULT nous indiquant au milieu le mouvement, document rare qui est significatif d'une époque du théâtre, époque d'avant 1968 où les  courants théâtraux des années 50 et 60 de Jean VILAR et de J.L.BARRAULT étaient les héritiers directs de ce que l'on a appelé le cartel: BATY-DULLIN- JOUVET-PITOEFF, grande lignée théâtrale depuis le début du XXème siècle.

Avant de clore ce premier article sur ma période de l'Odeon, un mot sur une autre pièce dans laquelle j'étais et dont vous voyez quelques photos plus haut dans l'article. Il s'agit de COMME IL VOUS PLAIRA de SHAKESPEARE dans laquelle étaient distribués Dominique PATUREL, Simone VALERE, Jean DESAILLY et J.L.BARRAULT lui-même qui réglait la mise en scène. Pièce très légère et très drôle de SHAKESPEARE, une comédie très bien jouée et très agréable à jouer. Moments délicieux, trac juste ce qu'il faut, beaucoup de joie. Le théâtre, c'est aussi tout cela.

Je vais arrêter pour aujourd'hui mon long article. Pour ceux qui me liront, je veux simplement dire que je suis très touché de leur attention et de leur intérêt. Il est difficile de se raconter sans parfois ennuyer le lecteur qui est souvent étranger à ce qu'il lit, mais il ne faut jamais oublier, et j'essaie de ne l'oublier jamais que le seul fil conducteur est: LE THEATRE. Il faut dégager cette chose unique car tout revient à cela.

J'étais parti sur le moment présent avec LES BALADINS, et puis je me suis rendu compte que pour bien tenir, un batiment a besoin de bonnes fondations, c'est pourquoi je suis revenu aux sources. Vous savez, dans la vie, les choses et les évènements ne sont pas toujours écrits d'avance. On est ce que l'on est mais on est surtout ce que l'on devient; LE DEVENIR est pour moi plus important que L'AVENIR.

Vous retrouverez bientôt LES BALADINS avec ses joies et ses difficultés.

Bien à vous.

RICHARD.